Les microbatteries CMS d'I-TEN rangent les piles-boutons au rayon des antiquités

Au moment où se multiplient les petits objets et dispositifs électroniques connectés, la question de leur alimentation énergétique se pose avec une acuité de plus en plus prégnante. Mais la jeune société lyonnaise I-TEN pourrait bien avoir résolu la quadrature du cercle. Elle compte lancer vers la fin 2015 des microbatteries céramiques à forte densité d’énergie ou de puissance sous forme de composants à montage en surface, aptes à supporter les contraintes de la soudure à la vague lors de la production des cartes électroniques et compatibles avec les procédés de recyclage classiques ! ... 

A l’heure du tout-connecté et de la multiplication de petits équipements doués de communication (cartes à puce, étiquettes NFC ou RFID actives, capteurs autonomes, passeports électroniques, montres intelligentes, dispositifs portés sur soi, etc.), la question de l’alimentation énergétique de tous ces objets devient de plus en plus épineuse. Certes, il existe des solutions adaptées de stockage de l’énergie. Mais aucune, pour l’heure, n’apparaît comme véritablement idéale.   Fabien Gaben, fondateur et directeur général d'I-TEN   De dimensions non négligeables et guère miniaturisables, les piles-boutons, par exemple, doivent être positionnées « à la main ». De plus, elles ne sont pas rechargeables, ne sont pas fiables à 100% et s’avèrent difficilement recyclables. D’un autre côté, les microbatteries miniaturisées « tout solide » disponibles auprès de sociétés comme Cymbet ont l’avantage de ne pas contenir d’électrolyte liquide. Donc pas de fuites possibles, pas d’inflammabilité potentielle et pas de dégradation au fil du temps… à la différence des traditionnelles batteries lithium-ion. Ces microbatteries souffrent néanmoins d’un inconvénient. « Elles s’appuient sur une architecture planaire et, par conséquent, si l’on veut augmenter la puissance délivrée, il faut multiplier les cellules et augmenter d’autant la surface occupée ; elles deviennent alors difficiles à implémenter de par leur encombrement, assure Fabien Gaben, fondateur et directeur général de la jeune société I-TEN, créée en décembre 2011 et basée à Champagne-au-Mont-d’Or (69), tout près de Lyon. C’est un défaut dont ne souffre pas notre propre technologie de microbatterie lithium-ion en couches minces entièrement solide. Notre procédé de fabrication permet de réaliser des microbatteries céramiques à forte densité d’énergie ou de puissance sous forme de composants à montage en surface, aptes à supporter les contraintes de la soudure à la vague lors de la production des cartes électroniques et compatibles avec les procédés de recyclage classiques. »   Stocker dix fois plus d'énergie que la concurrence   Selon le dirigeant d’I-TEN, il est ainsi tout à fait envisageable avec les procédés mis au point par la start-up de réaliser, par exemple, des microbatteries en boîtier CMS au format 1210 (2 x 3 mm) de 150 µm d’épaisseur et dotées d’une capacité de 0,2 mAh (sous 2,5 V). Plus globalement, l’approche suivie par la jeune pousse vise à stocker, dans un espace comparable, dix fois plus d’énergie que les technologies concurrentes de microbatteries et vingt fois plus que les supercondensateurs, des composants encombrants qui, de plus, souffrent d’une très forte autodécharge et ne sont pas compatibles avec la soudure à la vague… « Nous sommes sur un marché très concurrentiel et nous ne donnons pas de détails sur notre technologie, ajoute Fabien Gaben. Notre apport réside à la fois sur la chimie, l’architecture et le procédé de fabrication des microbatteries. » Des compétences très pointues qu’a pu maîtriser le fondateur d’I-TEN au cours de son parcours. Docteur en physique-chimie, Fabien Gaben peut se targuer d’une quinzaine d’années d’expérience en gestion de projets industriels complexes, notamment dans le domaine des batteries lithium-ion.   Une levée de fonds de 3,2 millions d'euros en 2014   « Avant de créer I-TEN, j’avais travaillé pendant un an sur le projet et sur une preuve de concept au sein de l’incubateur lyonnais Crealys », rappelle le dirigeant de la jeune société qui a pu bénéficier en avril 2014 d’un gros coup de pouce de partenaires financiers (Innovacom, Demeter Partner et Rhône-Alpes Création) pour lancer la préindustrialisation de ses produits. « Nous sommes en ce moment-même focalisés sur la mise en place dans nos locaux d’une petite unité de fabrication pilote qui nous permettra de produire des préséries industrielles à partir de la fin 2015, précise Fabien Gaben. Une deuxième levée de fonds est d’ores et déjà programmée à cette date pour passer à une étape ultérieure. » Parallèlement, I-TEN, qui collabore avec l’ENS de Lyon et le Laboratoire interdisciplinaire Carnot de Bourgogne (ICB) dans les domaines respectifs de la chimie des matières premières et de la modélisation des procédés, espère doubler tous les ans ses effectifs. Avec huit personnes aujourd’hui, la jeune société rhodanienne pourrait ainsi compter une vingtaine de salariés dès la fin de l’année prochaine.   Les microbatteries d’I-TEN devraient intéresser plusieurs domaines d’application. « Nous visons en premier lieu le remplacement des piles-boutons et des supercondensateurs utilisés dans les ordinateurs et les téléphones mobiles pour l’alimentation des fonctions de sauvegarde, détaille Fabien Gaben. Nous ciblons aussi le marché des documents d’identification électroniques et des cartes bancaires où la présence d’une microbatterie à bord peut permettre d’offrir des fonctions de sécurisation supplémentaires dans la puce. » Les capteurs autonomes dans les applications M2M (en accompagnement de systèmes de récupération d'énergie ambiante), les étiquettes électroniques actives en général et tout type d’objet connecté utilisé au quotidien sont également au menu des microbatteries d’I-TEN. La société envisage non seulement de proposer des produits standard sur catalogue mais aussi de développer des offres spécifiques sur cahier des charges en travaillant en amont avec de gros donneurs d’ordre.