[TRIBUNE de Bruno Hamamlian, BIRDZ] A la course effrénée vers des réseaux toujours plus rapides et généreux en données, s'oppose désormais un besoin de frugalité et de sobriété numérique pour développer un Internet des objets de manière responsable et respectueuse de l'environnement. Un éclairage donné par Bruno Hamamlian, directeur international et marketing stratégique chez Birdz, société pionnière de l'Internet des objets pour les villes et les services publics. ...
Lorsque l'on parle de performance en matière de services numériques connectés, on s'attarde souvent sur la disponibilité, la rapidité ou encore le débit utile de données pour évaluer les performances des réseaux de connectivité utilisés. A l'aube du déploiement massif de la 5G, du NB-IoT ou encore du LTE-M, ces notions de quantité de données et de vitesse d'échanges sont au cœur de l'actualité technologique. Plus de données, plus vite, disponibles partout et à tout instant sans attendre, voilà ce qui semble focaliser les attentes.
C'est en réalité partiellement vrai. En matière d'accès Internet mobile pour les usages B2C (des entreprises vers les consommateurs finaux), il est effectivement attendu que les réseaux télécoms soient plus véloces et performants, partout. Dans le monde des entreprises et des villes, ce sont d'autres attentes qui émergent et mûrissent. Ces acteurs professionnels choisissent de plus en plus des capteurs connectés (IoT) pour mesurer, suivre et comprendre de nouvelles informations issues de leurs villes et territoires.
Destinés spécifiquement aux acteurs B2B (entreprises s’adressant à d’autres entreprises), ces nouveaux IoT structurent de nouvelles attentes en matière de connectivité. A la course effrénée vers des réseaux de connectivité toujours plus rapides et généreux en données, s'oppose désormais un besoin de frugalité et de sobriété numérique. Désormais, c'est la capacité de choisir un réseau de connectivité en fonction du besoin qui définit la performance et la réussite d'un projet IoT. Il s'agit là d'un point crucial pour développer l'IoT de manière responsable et respectueuse de l'environnement.
L'IoT durable ne cherche pas la performance à tout prix, il cherche à répondre à un besoin réel en utilisant les technologies ayant la plus petite empreinte environnementale possible.
Des objets connectés durables pour amoindrir l'impact environnemental
Une grande partie des besoins en matière d'IoT se concentre en effet sur la remontée d'informations peu volumineuses. De telles données n'ont pas besoin d'utiliser des réseaux cellulaires de haute performance. Il est donc possible d'adopter ici une approche low-tech et de choisir un réseau moins énergivore. En tête de ces réseaux « basse consommation », on retrouve les réseaux de connectivité utilisant le protocole de communication LoRaWAN, déployé dans 167 pays par 151 opérateurs à travers le monde.
Fondée en 2014, l'alliance LoRa a défini et promu le protocole LoRaWAN afin de satisfaire les nouvelles attentes en matière de connectivité pour les applications professionnelles. Grâce à ce protocole, les objets connectés peuvent utiliser une même pile pendant 10 à 25 ans, évitant ainsi aux exploitants et utilisateurs de services numériques de devoir intervenir pour changer la pile de leurs capteurs IoT. En allongeant la durée d'exploitation d'un capteur IoT, les utilisateurs de nouveaux services numériques contribuent à réduire l'impact environnemental des technologies qu'ils consomment.
Devenu standard de facto grâce à ses nombreux avantages, le réseau LoRaWAN ambitionne de devenir un standard de télécommunication au même titre que la 5G. L'ambition est forte, mais le parcours de standardisation est long et périlleux.
La standardisation du protocole LoRaWAN au cœur de l'IoT durable
La LoRa Alliance, association regroupant plus de 600 entreprises partenaires, permet aux acteurs engagés de se regrouper et de demander la reconnaissance de LoRaWAN en tant que standard - au même titre que le Wi-Fi ou encore le Bluetooth. Cette standardisation permettrait de garantir une interopérabilité parfaite entre les différents opérateurs.
Fondée en 2014, l’alliance LoRa a battu des records en matière de rapidité de croissance et d'adoption communautaire. Preuve qu'il s'agit d'une technologie clé dans ce marché protéiforme. Mais, au-delà des opérateurs et spécialistes de l'IoT, il est important que les acteurs professionnels et industriels s'engagent eux-aussi pour le déploiement du réseau LoRaWAN et de l'IoT durable. Car ce réseau, ayant déjà prouvé son efficacité, ne doit plus se cantonner à des prototypes et projets tests, il faut à présent qu'il serve une réelle destinée municipale, territoriale ou citoyenne. Et cela ne se fera pas sans le déploiement de projets de grande envergure.
L'Edge Computing - autre pilier de l'IoT durable
L'Edge Computing, c'est-à-dire la capacité de traitement d'informations en périphérie et non sur un système informatique central, est une autre technologie cruciale en matière d'IoT durable. Le rôle premier des objets connectés est de capturer et de transmettre des mesures en tout genre. Dans un fonctionnement « classique », toutes ces données sont transmises à un centre de données (Data Center) chargé de les traiter grâce aux algorithmes présents sur les serveurs.
Avec l'Edge Computing, l'intelligence est embarquée dans l'objet en lui-même. Au lieu d'envoyer un flot continu d'informations vers un Data Center, l'objet va donc traiter les données directement, les trier et n'envoyer vers le cloud que les données utiles. Encore une fois, cette démarche permet de réduire l'impact environnemental en réduisant la consommation énergétique.
L'IoT durable ne se positionne pas sur le Big Data, mais au contraire sur « l'information utile ». L'idée n'est pas de récupérer l'ensemble des informations, mais seulement les données utiles à l'usage décidé. Ainsi, la qualité de service reste la même, mais l'impact environnemental est réduit.
La technologie au service de l'usage
L'important dans un projet IoT durable est de prendre en considération l'intégralité des usages et de leurs enjeux. Si certains usages nécessitent une très forte bande passante et une instantanéité sans faille, comme la vidéosurveillance par exemple, d'autres nécessitent des réseaux peu énergivores mais durables, comme le monitoring souterrain des réseaux d'eau. C'est pourquoi le réseau doit être choisi en fonction des usages, en gardant toujours en tête les enjeux environnementaux. Les technologies comme le NB-IoT seront ainsi très puissantes, et nécessaires pour certains usages, mais elles occasionneront également des problématiques de déchargement rapide des batteries et de déchets électroniques.
A l'inverse, le réseau LoRaWAN sera, de son côté, utile pour les objets connectés nécessitant peu de bande passante et de maintenance, mais limité lorsqu'il s'agit de données volumineuses. Une approche plus durable de l'IoT est cruciale au développement des territoires intelligents, aussi appelés smart cities. Ces derniers nécessitent une offre multiservice et multi-application (collecte de déchets, contrôle de la qualité de l'air, stationnement intelligent, réseau de caméras, etc.), qui devra mêler intelligemment plusieurs types de réseaux tout en assurant l'interopérabilité. Lorsque l'on sait que, dans l'optique d'un futur déménagement, 42% (*) des Français privilégieront une ville ayant déjà entamé des démarches de « territoire intelligent », on comprend alors rapidement l'urgence de déployer de tels projets, tout en garantissant l'interopérabilité et la durabilité des projets IoT.
(*) Sondage Birdz, réalisé par OpinionWay en janvier 2021 sur un échantillon représentatif de 1 001 Français