Le français Isentroniq lève 7,5 millions d’euros pour lever le verrou du câblage en vue de démocratiser le calcul quantique

La toute jeune société française Isentroniq, crée en avril 2025, basée à Saint Germain en Laye (78) et qui a développé une technologie de câblage de nouvelle génération pour les ordinateurs quantiques supraconducteurs annonce une levée de fonds de 7,5 millions d’euros. Une opération menée par le fonds Heartcore, avec la participation d’OVNI Capital, iXcore, Kima Ventures, Better Angle, Epsilon VC avec le soutien de Bpifrance et de l’Agence Nationale de la Recherche dans le cadre du plan France 2030 du gouvernement.

L’objectif affiché de sa technologie est d’éliminer les contraintes de chaleur, de coût et d’espace dans les cryostats afin de réaliser des calculateurs quantiques dépassant le million de qubits. Ce financement va permettre à l’entreprise cofondée par Paul Magnard (PhD en circuits supraconducteurs à l’ETH Zurich, ancien architecte en chef chez Alice & Bob) et Théodore Amar (ingénieur-commerce de Centrale Paris et ESSEC) de se donner les moyens de développer sa technologie de câblage, de composer une équipe d’ingénieurs de haut niveau - ouverture en 2026 de recrutements de profils d'ingénieurs quantiques, mécaniques, hyperfréquence et logiciel - et de nouer des partenariats industriels stratégiques afin d’offrir une solution complète et plug-and-play pour la conception d’ordinateurs quantiques à grande échelle.

Isentroniq rappelle que les ordinateurs quantiques pourraient révolutionner des domaines comme la médecine, l'énergie et la logistique en résolvant des problèmes qui dépassent les capacités des supercalculateurs actuels. Mais les qubits (ou bit quantique, unité de base de l'information dans l'informatique quantique) sont fragiles et sujets aux erreurs. Il en faut des milliers pour encoder un seul qubit "logique" fiable.

Ce qui signifie, selon Isentronic, que les machines doivent passer de quelques centaines de qubits aujourd'hui à des millions à l'avenir avant de pouvoir fournir des résultats utiles à l'échelle industrielle. Aujourd’hui, toujours son Isentroniq, les qubits supraconducteurs apparaissent comme la voie la plus prometteuse pour réaliser un ordinateur quantique tolérant aux erreurs.

Mais leur couteux besoin en infrastructures cryogéniques constitue un obstacle majeur pour passer à l’échelle. Car chaque ligne de contrôle qui relie les qubits à l’extérieur du cryostat apporte chaleur et encombrement, ce qui limite rapidement le nombre de qubits par cryostat. Résultat : au-delà d’une centaine de qubits, note Isentropiq, les systèmes actuels atteignent leurs limites thermiques et spatiales.

Ainsi, avec les technologies actuelles, construire un ordinateur quantique d’un million de qubits exigerait des installations colossales, de la taille de dix stades, et des investissements de plusieurs dizaines de milliards d’euros. A ce niveau, la technologie développée par Isentroniq a pour ambition de supprimer les trois verrous majeurs actuels de ce type d’infrastructure que sont la chaleur, le coût et l’encombrement du câblage quantique en vue d’intégrer jusqu’à 1 000 fois plus de qubits dans un cryostat.

À terme, cette approche pourrait, selon Isentropiq, ramener le coût d’un système d’un million de qubits à environ 50 millions d'euros.

Au-delà, la société adopte un modèle fabless, en s’appuyant sur un réseau de partenaires industriels spécialisés pour la fabrication, un modèle qui réduit les besoins en dépenses d’investissement (Capex), accélère le passage du laboratoire à l’industrialisation et garantit un niveau de qualité élevé.

« Le câblage est le véritable goulot d’étranglement du quantique, explique Paul Magnard. Et grâce à cette levée de fonds, nous allons industrialiser une technologie de câblage qui permet de réaliser des machines de plus d’un million de qubits et de rendre le calcul quantique utile, au service de la recherche et de l’industrie. »

Les fondateurs d’Isentroniq notent que cette levée intervient alors que les grands acteurs du marché - Google, IBM, Amazon, IQM, Alice & Bob, Rigetti - affichent des feuilles de route ambitieuses vers des systèmes à 100 000 puis 1milliions de qubits. Or, sans percée sur l’infrastructure, ces ambitions resteront théoriques. En levant le verrou du câblage, Isentroniq estime donner à ces perspectives une réelle trajectoire industrielle.